Rando dans les Pyrénées en toute simplicité

Rando dans les Pyrénées en toute simplicité

Pic du Madrès en boucle par le Roc Négre

28/06/2013 : Col de Jau – refuge de Callau – Pâturage de la Rouquette – Gourg Estelat – Gourg Blau – Clot Rodon – Roc Négre (2459m) – Pic de Madres (2469m) – Pic du Bernard Sauvage (2423m) – La Glèbe – Forêt de Lapazeuil – Col de Jau

 

Le massif du Madres est une large montagne qui s’étend sur le Capcir pour une part, sur le Conflent pour un autre versant et enfin sur les Pyrénées Audoises par son versant Nord. Comme elle n’a n’y la prestance d’un Canigou, ni l’altitude d’un Carlit, cette montagne est souvent oubliée des touristes et autres montagnards occasionnels. Pourtant c’est certainement le massif le plus complexe et le plus varié que propose le département. On trouve des forêts denses allant des hêtres aux résineux, plusieurs vallées glacières en forme de berceau, des étangs, et un sommet aussi sauvage que débonnaire. Les possibilités de randonnées et d’accès à sa cime sont presque infinies.

Le parcours que je propose de visiter aujourd’hui combine un peu tout cela, un concentré du massif pour une boucle à couper le souffle. Venant de Carcassonne, le départ « naturel » se situe au col de Jau. Je quitte donc la voiture à 6h55 avec un vent déjà important, et une température presque hivernale de 7°C. Je m’engage sur la piste forestière et j’arrive au refuge abandonné de Callau à 7h16.

 

Refuge de Callau

Il faut poursuivre la piste et après un grand virage en épingle à droite, soit 9 minutes après le refuge, prendre dans la forêt sur la gauche. Un sentier balisé de cairns, permet de monter droit dans le massif de la Rouquette. Je retrouve la piste, quittée plus bas, à 7h37. Il faut tourner à gauche pour poursuivre la montée en faux plat.

 

Après une heure de marche, la piste est coupée par le torrent de Canrec, facilement franchissable.

 

Torrent de Canrec

 

Il faut immédiatement monter à droite dans le talus et traverser une zone déboisée. Ici c’est entièrement hors sentier, malgré de vagues sentes certainement dues aux passages des vaches. On monte jusqu’à rejoindre une large crête, où l’on trouve une clôture, et pour cause, les vaches ne sont pas loin. Il faut suivre la clôture qui se situe sur la limite des deux versants. En basculant sur le versant Sud, le massif du Canigou apparaît au loin.

 

Panorama sur le Canigou

Je suis, presque de niveau, une courbe entre 1950m et 2000m. Ce coin de montagne est entièrement oublié des randonneurs. Des vaches gasconnes apeurées paissent là, au milieu de zones humides. A mon grand étonnement, je trouve quelques névés sous les pins et avec le froid du jour, ce n’est pas prêt de fondre. Avant de descendre j’aperçois au dessus de moi une biche, qui prend vite peur. Puis c’est au tour d’un troupeau d’une quarantaine de mouflons à détaler promptement. C’est si sauvage que la faune est peu habituée à la présence des hommes.

 

La suite se trouve vers la partie enneigée, au loin.

 

En amorçant la descente, on domine le petit Estany del Clot.

 

Il faut ensuite descendre chercher un sentier plus bas, en traversant en alternance, des zones de genets et des pierriers. Dans un pierrier assez croulant, je viens à perdre l’équilibre et pour me rattraper, ma jambe droite frappe sur un rocher. Une vive douleur traverse mon tibia droit. Je quitte au plus vite cette zone instable, mais déjà le bas de mon pantalon se colore en rouge, de plus en plus rouge. Je poursuis au mieux ce passage délicat, et une fois le sentier atteint, je me pose pour constater les dégâts. Il est 9h08 quand je suis contraint à un arrêt blessure. Le vent est à peine soutenable, compliquant encore plus les soins. Je constate un petit trou proche du tibia ; je stoppe l’hémorragie, je fais un bandage et reprends la marche à 9h15. Il faut alors suivre un sentier balisé de jaune.

 

Les éboulis d’où je viens.

 

La suite du chemin avec en fond les pentes enneigées qui m’attendent.

 

Il me faut seulement 15 minutes pour rejoindre le gourg Estelat appelé également lac de Nohèdes, dont voici la légende :

« Dieu, après avoir créé le monde, cherchait en bon perfectionniste à améliorer son œuvre. Il passa un jour par Évol, et rencontra dans la montagne d'horribles sorcières. Il leur demanda malgré tout ce qu'elles désiraient pour embellir leur séjour, et elles souhaitèrent avoir un étang. Dieu s'exécuta, mais il le fit sombre, ténébreux, à l'image de leur âme. Ce fut le Gorg Negre. Cependant, non loin de là, à Nohèdes, vivaient des fées aimables et gracieuses que Dieu voulut récompenser : il déroba un morceau de l'étang qu'il venait de créer et le répandit sur le territoire des fées, tout en y ajoutant une poignée d'étoiles qu'il décrocha du ciel. Ce fut évidemment le Gorg Estelat. Il s'aperçut alors que, pendant ses travaux, il avait laissé tomber une petite flaque d'eau au creux d'un rocher. Il la trouva jolie, l'agrandit un peu et la colora avec le bleu du ciel. Ce fut le Gorg Blau.

Les sorcières, voyant le travail du Créateur, manifestèrent leur jalousie. Mais Dieu, excédé par ces mégères, versa dans leur étang une grande quantité d'encre, et planta tout autour des pins tout noirs, encore plus noirs que la nuit. Le Gorg Negre devint encore plus sombre qu'il ne l'était et le demeura éternellement. » (légende recueillie par Didier Payré dans son ouvrage Mémoires de Nohèdes).

 

Etang de Nohèdes

 

Déversoir de l’étang

 

Il faut passer rive droite de l’étang pour le contourner. Il y a de nombreux barbecues sur la berge, certainement confectionnés par les pêcheurs. C’est un endroit rêvé pour faire un bivouac. On arrive rapidement à l’extrémité du lac et un vague sentier indique l’axe à suivre. Mais de gros névés sont présents sur l’itinéraire. J’avais eu la bonne idée de prendre le piolet, c’est l’occasion de le sortir.

 

Il faut passer le verrou dans la neige, la photo écrase un peu, mais c’est vraiment raide.

 

La neige est très froide et les crampons n’auraient pas été de trop. Avec précaution et prudence ça passe sans problème.

 

Le gourg Estelat vu en prenant de la hauteur.

Sans prévenir, au détour d’une bute, apparaît sur la gauche le plus beau de tous les étangs du coin, le Gourg Blau le bien nommé. Serti entre éboulis et pins à crochets, ses berges sont difficilement d’accessibles. Le bleu turquoise lui va à ravir. Un petit bijou que nous offre le massif du Madrès.

 

Gourg Blau

Ensuite il faut rejoindre le haut du plateau. Je choisis de traverser en dévers, un immense névé ressemblant plus à un glacier. La hauteur de neige au niveau de la rimaille dépassait les 2 mètres.

 

La traversée du névé

La position étant inconfortable sans crampons, je vais aller chercher un passage sec en bordure de névé. De l’autre côté du cirque, j’aperçois une harde de isards, mères et petits, qui traversent à grandes enjambées la zone d’éboulis. En quelques secondes, ils vont disparaître de mon champ de vision. Etonnante cette crainte, dans un endroit oublié des randonneurs !

 

Les 2 gourgs en étage.

 

Mur de neige avec corniche, mais ça passe à gauche.

 

Dernier regard vers là d’où je viens

 

A 10h40 je prends pied sur les hauteurs. Un large plateau, couvert de petits bosquets de pins à crochets, forme un altiplano qui contraste avec la première partie de cet itinéraire. On trouve immédiatement un sentier. Il faut alors suivre le balisage jaune et rouge du tour du Capcir.

 

Ici c’est à droite, le sommet du Madrès dans le lointain.

A mon grand étonnement, je rencontre un groupe de randonneurs, qui arrivent du col de Sansa. Le vent fait rage et nous secoue pas mal. Ce qui est surprenant ici, c’est de trouver autant de végétation à 2300m, et avec autant plus vent.

Sans difficulté le sentier monte en pente douce pour aller chercher une cime, le Roc Négre. Je foule cette cime à 11h05.

 

Le plateau parcouru, en se retournant.

 

Au loin, le Pic de Nou Founts frôlé une semaine avant.

 

Cime du Roc Négre, à gauche le sommet du Madrès, à droite le Pic du Bernard Sauvage.

 

La vallée de la Castellane, la crête sera l’itinéraire retour.

 

Le chemin va se faufiler dans un passage aussi étonnant qu’inattendu sur ce plateau débonnaire. Dans un rétrécissement, on trouve une sorte de cheminée où il faut poser les mains. Le passage est très court, mais exposé versant Sud.

 

Le sommet du Madrès au loin

 

En contre bas à gauche, la coume de Ponteils

 

Une fois sortie de ce goulet, c’est pratiquement à plat que l’on rejoint le sommet du Madrès. Le vent ne faiblit pas, bien au contraire. A 11h23, après 4h10 de marche, le point culminant du Madrès est atteint.

 

Le célèbre orri sommital à 2469m

 

Le Pic du Bernard Sauvage, tout proche

 

Le groupe de randonneurs ne tardera pas à me rejoindre. Le vent trop violent et trop froid va les chasser du sommet. Mais pour moi, il est temps de reprendre des forces. Blotti sous une dalle, à l’abri des rafales rageuses de la Tramontane, je vais prendre mon repas ; la température n’est que de 7,5°C. Pourtant je suis bien, tout là haut, avec la crête du Bernard Sauvage face à moi. En fait, on est toujours bien en haut d’un sommet. Après avoir fait un tour d’horizon pour apprécier le somptueux panorama qu’offre ce sommet, je reprends la marche à 12h15.

 

Le Pic Carlit au centre avec beaucoup de neige

 

Sous le col des Gavaches, l’étang de l’ours est encore gelé.

 

Le Roc Négre depuis le Madrès, au second plan le Mont Coronat, au fond le Canigou

 

Par temps clair et dégagé, la suite se passe sans encombre. Il faut laisser maintenant le balisage du GR, pour partir plein Nord et descendre à un col. De là on a une vue dominante sur la vallée de la Castellane.

 

Ça remonte un peu pour accéder au Pic du Bernard Sauvage, plus une éminence qu’un vrai sommet. Je ne fais que passer à 12h30, sans prendre de temps de m’y arrêter.

 

Sommet du Pic du Bernard Sauvage avec le Madrès au fond

 

A partir de là, la montée est terminée. La suite ne sera qu'une longue descente. Je reste sur la crête, avec à main droite le précipice vers la vallée glacière. On trouve rapidement une ancienne clôture qui doit démarquer les départements de l’Aude et des P.O. Sans difficulté, on se laisse guider par une sente et on arrive jusqu’à une dernière éminence rocheuse nommée La Glèbe.

 

Les crevasses d’un glacier suspendu

 

A cet instant, les arbres éparses se densifient, jusqu’à former une véritable forêt.

Dernier regard sur la crête avant de plonger dans la forêt.

 

On trouve toujours une sente bien franche sur le sol. Ce sentier est propre et permet d’avancer rapidement. Pourtant, en arrivant dans une clairière, ce sentier disparaît totalement. Je dois rester toujours sur une vague crête qui est devenue virtuelle. Le relief en sous-bois ne permettant pas de bien la matérialiser. En ayant pris un cap à la boussole, je marche en suivant cet azimut. Il faut quand même prendre garde de ne pas perdre trop de dénivelé sur la gauche. Le GPS va me venir en aide à plusieurs reprises.

 

Erythrone Dent de chien

 

On trouve, dans cette forêt de hêtres, de nombreuses zones humides, semblables à des départs de sources. Bien qu’aucune activité humaine ne soit visible, le sous-bois reste propre. Seuls quelques arbres couchés, trahissent un abandon des lieux. A la sortie du bois, on tombe exactement au niveau de col de Jau, quasiment à la stèle. J’en termine avec cette grande boucle à 14h40.

Quel parcours !  Il se déroule pratiquement à 90 % hors sentier. Cela m’a permis de voir plus de paysage, plus d’animaux sauvages et de ne croiser pratiquement personne. Le vent aura été mon compagnon, pénible, jusqu’à la voiture. Par contre, en cas d’accident, il est vraiment indispensable d’avoir un nécessaire de soin sur soi. A ce propos, une fois la plaie nettoyée en soirée, un joli trou qui aurait mérité quelques points de sutures, marquera à jamais, ma jambe droite. Une boucle que je recommande à tous randonneurs expérimentés.

 

Tracé du jour sur carte IGN:

Trace_Bleue.jpg

 

La journée en chiffres :

Temps de marche total 6h29 pour 22,4 Km à 4 km/h

Dénivelé positif total : 1288m – autant en négatif

Point culminant : 2469m.



29/06/2013
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