Crêtes de la réserve de Mantet jusqu’au Pic du Géant en hivernale
02/02/2025 : Mantet (1570m) – Refuge de l’Alemany – Pic de Serra Gallinera (2663m) – Pic de la Dona (2702m) – Pic dels Bacivers de Prats (2845m) – Pic du Géant ou Bastiments (2881m) – Pic de la Dona – Portella de Mantet (2412m) – Collets Verds – Clots d’Espantanllops – Mantet
Préambule : Le parcours du jour étant ambitieux pour être réalisé à la journée en cette saison, une approche jusqu’au refuge de l’Alemany afin d’y passer la nuit est plus que recommandable.
Avec Yannick, en ce samedi 1ier février, nous quittons donc le village de Mantet à 16h27 pour remonter la vallée de l’Alemany en suivant le GR10. Aucune originalité, suivre les balises rouges et blanches sans se poser de question. Il y a peu de neige mais de la glace vive se cache sous le tapis blanc, glissades à redouter et redoutables. Le refuge est atteint à 17h55 alors qu’il fait encore jour. Nous n’aurons mis que 1h28. Un randonneur est déjà présent, nous passerons la soirée à trois. Le refuge est fidèle à ce que nous lui connaissons, c’est-à-dire propre et bien équipé en couchages. Pour trouver de l’eau liquide, il faut se rendre seulement une minute en aval du refuge. Malgré une flambée de bois plus ou moins vert dans le poêle, la température dans l’abri ne dépassera pas les 6°C.
Debout à 5 heures, il fait 4°C dans le refuge. Lorsque nous prenons le départ à 6h02, la météo nous joue un mauvais tour puisqu’il neige légèrement, ce qui n’était pas prévu. Nous reprenons la marche sur le GR10 afin de s’élever jusqu’à atteindre un plateau. La recherche du GR10 dans ces conditions s’en trouve passablement perturbée. Des nombreuses traces de lièvres vont nous être bien utiles pour ne pas perdre le sentier. Les habitants permanents des lieux doivent avoir un GPS intégré tant la précision est grande. C’est au moment où nous parvenons sur un plateau, que nous choisissons de quitter le GR10 et poursuivre la prise de hauteur en hors-sentier. Il fait vraiment très froid à cet instant, alors que le jour se lève mais que le soleil reste malgré tout absent. La neige a cessé de tomber. Subitement, sans la voir arriver, Yannick est foudroyé par une hypoglycémie. Vertige, proche du malaise, il doit se coucher sans force. Je lui lève les jambes au-dessus de la tête, lui fournis des chaufferettes pour apporter de la chaleur rapide aux mains, un peu de patience, et l’énergie revient. Nous poursuivons à petits pas l’ascension du premier sommet du jour. C’est qu’il est vaillant le frangin ; je ne dis rien mais je suis admiratif devant sa volonté à ne pas renoncer. Pas de difficulté particulière pour s’orienter, pas plus pour évoluer dans une neige peu profonde. Il est 8h23 lorsque nous parvenons sur le pic de Serra Gallinera en 2h20. La température est de -7°C avec un léger vent qui glace instantanément les mains exposées à l’air libre. Nous ne faisons que passer. En suivant au mieux la Serra Gallinera tout en évitant le bord de la crête trop glissante à cause de la neige fraîche, nous montons au Pic de la Dona à 9h24, en 3h20.
Sur le sommet du Pic de la Dona
A G Pic du Géant, à D Pic dels Bacivers de Prats (en survol de l'image l'eneigement 1 mois plus tôt)
Pic de Serra Gallinera d'où nous venons
Vue vers l'est sur le plat de Coma Ermada
Nous passons peu de temps sur cette cime, car le froid nous incite à rester en mouvement. Le soleil est toujours absent, allons voir plus loin s’il s’y trouve. Direction le col du Géant. J’y suis passé il y a juste un mois sans crampons, et même si l’enneigement est plus important en ce jour, cela ne nécessite toujours pas l’usage de crampons et encore moins celle des raquettes. Au niveau du col, nous basculons en versant nord pour s’engager dans la coma dels Bacivers. La neige est bien présente mais en faible quantité, tout juste skiable. Nous arrivons aisément au pied du pic pour remonter le pilier sud/est. L’ascension n’est pas complexe mais il y a 215 mètres bien verticaux. Nous suivons les traces fraîches d’un lièvre, quand nous apercevons l’animal nous faire une démonstration de puissance. En moins d’une minute, il aura avalé ce dénivelé en courant pleine pente, comme pour nous narguer. Grand respect à lui et longue vie s’il ne croise pas une balle assassine. Nous serons à 11h27 sur le Pic dels Prats de Bacivers après 4h51. Ce sommet domine la Coma Mitjana à l’ouest et permet de poser un regard sur l’imposante face nord du pic du Géant.
Pic du Géant et col du Géant
Pic dels Bacivers de Prats où nous allons
Coma dels Bassibers et face sud du Pic Gallinás
Serra Gallinera et Pic de la Dona
Une idée de l'ambiance glaciale sur la crête du pilier sud/est
Pech de Bugarach loin dans les Corbières
Sur la cime du Pic dels Bacivers de Prats
Face Nord du Pic du Géant
Massif de Montserrat proche de Barcelone
La suite consiste à parcourir la crête nord reliant le Prats de Bacivers au Géant. Bien que cette crête ne soit nullement technique, elle ne permet pas de marcher bien vite à cause des ondulations. C’est une occasion pour nous de se délecter du paysage blanc hivernal, et comme nous nous trouvons sur l’une des crêtes les plus hautes du département, nous avons une forêt de sommets qui s’étire vers l’ouest dont le regard a parfois du mal à différencier nettement les vallées. Une courte rampe finale nous dépose sur la cime ouest où trône fièrement l’imposant piolet sommital. Il est 12h21 et nous avons mis 5h40. Nous n’irons pas plus loin vers l’ouest, ce n’est déjà pas si mal car le retour s’annonce encore plus long que l’aller. Le soleil est enfin présent, le vent nul, le repas sera le bienvenu en terrasse, à l’écart des vagues incessantes d’espagnols qui viennent faire leur selfie avec le piolet.
Gros plan sur le Pic de Nou Founts
La crête d'où nous venons dans le dos
Coma de Freser avec le Pic de Balandrau en fond
Après une pause de plus d’une heure où il ferait presque chaud face au soleil, nous quittons la place à 13h38. Nous traversons la longue cime et choisissons d’aller au plus direct. Direction donc à la Portella de Mantet via le pic de la Dona qui sera franchi deux fois. La marche est bien plus rapide que dans la matinée et la remontée du col du Géant au pic de la Dona passe sans même s’en apercevoir, mais l’heure tourne. Il est quand même 14h54 lorsque nous passons une nouvelle fois sur la cime de 2702 mètres où il y fait beaucoup moins froid que 5 heures plus tôt. Descente rapide en 30 minutes jusqu’à la Portella de Mantet [15h20].
Vue vers l'est depuis la cime du Pic du Géant
Les 2 Gra de Fajols sur notre droite
Nouveau regard d'où nous venons
Portella de Mantet vue vers le nord
A cet instant, nous faisons le choix de rester en crête afin de parcourir la Baga de la Portella et éviter les plaques de glace dans la vallée de l’Alemany. Cette croupe dénudée et battue par le vent nous réserve une surprise de taille. Une fois que l’on s’approche de la végétation aux environs des Collets Verds, un coup de frein nous ralenti. La neige est si profonde que l’on s’enfonce à chaque pas au-dessus des genoux. C’est une lutte de tous les instants pour ne pas tomber. Nous ne nous attendions pas à trouver une telle quantité de neige sur ces hauteurs de moindre altitude. Pratiquement plus d’une heure de lutte pour trouver enfin un terrain plus « fréquentable ». Il va s’en dire qu’il n’y a aucune trace d’hominidé dans cette lande, mais les lièvres, renards et autres coq de bruyère ne manquent pas. La vie sauvage est riche, certainement les bienfaits de la réserve. C’est au niveau de la côte 2058 des Caps dels Rocs que la neige abondante disparait. Il faut basculer sur la droite vers l’est, mais le sentier est discret. Ce lieu est fréquenté par des bovins en saison estivale, donc soigneusement entretenu.
La Baga de la Portella
Cela donne une idée du sans du vent
Ce point marque pour nous l’entrée en forêt. La marche s’en trouve améliorée et la descente se poursuit sur un bon rythme. Le sentier évolue longtemps en balcon bien au-dessus du torrent du Ressec. Ce sentier semble être confidentiel car très peu de cairns, mais propre et agréable ; c’est une option à connaître pour l’été si l’on souhaite évoluer à l’ombre. Par une providentielle passerelle qui tient debout plus par l’opération du Saint Esprit que par celle de la meilleure ingénierie, il est possible de franchir le torrent les pieds au sec et ainsi passer sur la rive droite orographique. Il ne reste plus qu’à suivre la berge du cours d’eau où l’on ne tarde pas à trouver des balises jaunes qui conduisent en pente douce jusqu’au village de Mantet. La boucle est ainsi fermée en 10 heures, il est 18h22 et le jour cède peu à peu sa place à la nuit. Un très beau week-end s’achève avec un nouveau riche partage en famille et la connaissance d’un nouveau sentier.
Orri sous le Caps del Rocs
Le petit pont de bois comme l'a chanté Yves Duteil
Je citerai l'auteur Joseph Ribas qui s'est éteint en ce jour :
"La montagne ramène à l’élémentaire. Pour peu qu'on porte en soi assez de pureté, la crête la plus dérisoire nous réconcilie avec l'innocence ... "
Trace de la boucle :
Les chiffres de la journée :
Temps de marche total 10h00 pour 22,6 km à 2,2 km/h
Dénivelé positif total : 1448 m – Dénivelé positif total : 1880m
Point culminant : 2881m
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