Désert du Carlit en hiver
30/03/2018 : Plat des Aveillans – GR10 – Les Bouillouses – Estany de la Coumasse – Estany Llat – Estany del Viver – Les Bouillouses – Plat des Aveillans
Une nouvelle incursion dans le Capcir cette saison, pour profiter pleinement de l’enneigement exceptionnel, et pourquoi pas réaliser un nouveau couloir. J’ambitionne de gravir la face Sud du pic Carlit par le couloir hélico. Je sais que l’approche est vraiment très longue en cette saison, mais aussi que le soleil peut arriver vite sur la face Sud. Il faut donc partir très tôt. J’ai choisi ce vendredi Saint car la Lune est pratiquement pleine et devrait m’apporter suffisamment de lumière en complèment de la frontale. De plus, la météo annoncée devrait être acceptable après une longue période de dépressions. Il n’y a plus qu’à tenter l’aventure. A l’heure où je me présente au parking du plat des Aveillans, un vent violent souffle un air glacial, et de sombres nuages parcourent mon bout de ciel. Ça s’annonce mal ! Je décide de somnoler dans la voiture et d’attendre que ça passe. A 4h45, l’accalmie attendue est là, c’est parti pour une approche nocturne.
Du parking, trouver le GR10 n’est pas chose aisée dans l’obscurité, d’autant plus que celui-ci a été dévié, mais les balises sont bien visibles à partir du télésiège de « La Calme ». C’est un parcours très fréquenté au vu des nombreuses traces de raquettes qui le jalonnent ; il n’y a plus qu’à les suivre. Il est 6h22 lorsque je parviens à l’hôtel des Bones Hores, en 1h39. Ce départ nocturne est un test pour la gestion du manque de sommeil. Je n’ai pratiquement pas dormi cette nuit et à l’heure où le jour va se lever, la somnolence me gagne. En montagne, quand on a soif on boit, quand on a faim on mange, mais quand on a sommeil ? Marcher en dormant ? Dormir en marchant ? Non, je n’ai pas vraiment le choix, la fatigue générale est telle que je vais essayer de faire comme les marins solitaires en haute mer : un micro-sommeil. Je me pose donc pour trouver du repos, mais en veillant à ne pas succomber à l’hypothermie. C’est stressant de ne pas sombrer dans le sommeil profond, mais nécessaire. Les premières lueurs du jour vont me remettre en marche. Les couleurs du petit jour sont extraordinairement belles. Par contre, pas le moindre rayon pour gouter un peu de cette chaleur qui fait défaut.
Premières lueurs du jour sur le Puig del Pam
Mont Llaret et estany Sec
A l’estany Sec, je quitte l’itinéraire classique des étangs pour prendre plein Ouest. On trouve immédiatement l’estany Llat. La neige porte parfaitement bien en raquettes. Il tombe à présent du ciel de petites billes gelées, mais rien d’inquiétant encore. Je vais m’arrêter une nouvelle fois, à la base du Tossal Colomer, à 7h55, après 3 heures de marche. J’ai besoin d’un café chaud.
Pic Péric
Gros plan sur la face Ouest du pic Péric
Tossal Colomer
Lever de soleil sur l'estany Llat
Le Carlit est invisible d’où je me trouve, et ce seigneur des lieux semble décidé à n’accepter personne sur sa cime aujourd’hui. Pour me convaincre de faire demi-tour, il lance cette fois une vague de neige bien fournie. C’est aussi soudain qu’inattendu. En moins de 15 minutes le temps vient de tourner en intempérie. Le message est clair, fin de la partie par manque de combattant, je bats en retraite. Il faut rester humble devant des forces qui vous dépassent. Pas de couloir, pas de sommet aujourd’hui, juste la solitude du désert du Carlit. Une fois emmitouflé dans ma carapace de textile, je ne crains plus les assauts du général hiver. Avec les bourrasques dans le dos je suis vite de retour à l’estany Llat.
La vague de neige cesse aussi soudainement qu’elle s’était abattue. Puisque j’ai du temps devant moi, je vais déambuler dans cet univers uniforme. Et il est plaisant même d’arpenter ces espaces blancs, entrecoupés de quelques pins à crochets et blocs de granit. On peut aller pratiquement où l’on veut, contrairement où en été des zones marécageuses se détachent entre les étangs ; et contrairement au paysage estival, point de rhododendrons pour entraver la marche hors sentier.
Tossal Colomer et pic Carlit au fond
Autre plan en s'éloignant
Je rattrape alors le sentier des étangs au niveau de l’estany del Viver, pour revenir jusqu’au barrage des Bouillouses. 9h25, je passe sous l’imposant édifice en travaux, de cette immense retenue d’eau. Avec un niveau d’eau très bas, cette nappe blanche glacée à moins de charme à mon goût, en cette saison.
Estany del Viver
Les deux pics Péric
Afin de faire une boucle, je choisis de regagner mon point de départ en suivant la route. C’est certes monotone, mais rudement efficace pour rentrer vite. Je vais croiser des cortèges de randonneurs en raquettes qui se mettent en marche seulement maintenant. Au vu de leur équipement léger, ils ne doivent pas aller bien loin. 10h12 fin de cette ronde solitaire pour finalement 4h59 de marche effective. Un parcours qui peut se faire globalement en partant à toutes les heures du jour et qui m’aura appris que si je veux rééditer cette tentative de couloir, il faudra que je m’y prenne autrement. L’horizontalité de ces espaces fait qu’il y a beaucoup de distance pour un faible dénivelé, un contraste étonnant avec la réserve d’Orlu toute proche.
Tracé du jour sur carte IGN 1/25000
Les chiffres de la journée :
Temps de marche total 4h59 pour 18,5 km à 3,7 km/h
Dénivelé positif total : 630 m – Autant en négatif
Point culminant : 2270m
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