Refuge des Cortalets depuis Baillestavy en hivernale
27/01/2018 – Jour 1 : Baillestavy – GR36 variante – Ras de Prat Cabrera – GR10 – Ras dels Cortalets – refuge des Cortalets
Week-end traditionnel de janvier dans le massif du Canigou, avec la brèche Durier en point de mire. Mais en plein cœur de l’hiver, réaliser cette ascension reste aléatoire. Les chutes de neige de la veille vont rendre cette entreprise trop complexe. Anfin de découvrir de nouveaux itinéraires sur ce massif qui en compte une très grande quantité, je décide de prendre le départ au village de Baillestavy, dans la vallée de la Lentilla. Mon fidèle Yannick se joint à moi dans cette première journée qui s’avérera dantesque. Nous devons retrouver au refuge Nicolas et Pierrick qui partiront 500 mètres plus haut, par les classiques bois de Patriques, l’accès le plus rapide en toute saison.
La météo annonce de la pluie durant la première partie de la journée, puis des éclaircies après 13 heures. Il est donc inutile de partir trop tôt, afin d’éviter de se mouiller inutilement. Nous débutons cette journée à 10h02 depuis le parking bistrot du village. Il faut suivre la route afin de traverser le torrent de la Lentilla et prendre immédiatement à droite la route qui monte à l’église.
Nous suivons alors les balises rouges et blanches du GR36. Une route forestière prend de la hauteur en sortant du village. Nous arrivons à une barrière avec un panneau indicateur. Nous n’analysons pas correctement les informations du panneau et suivons scrupuleusement le balisage de la carte. La carte est erronée. Elle nous amène dans une propriété privée que nous traversons afin de retrouver à tâtons le GR ; cela nous fait perdre une bonne vingtaine de minutes. Une fois le GR retrouvé, nous évoluons sur un sentier au milieu de buis et de frênes. On ne tarde pas à rencontrer la première intersection où le GR se divise en deux branches pour une même destination. Nous choisissons la variante, donc celle de droite.
Première intersection
Le chemin est propre et semble être fréquenté régulièrement. Le dénivelé se prend doucement. Nous finissons par rencontrer la neige fraiche, mais nous allons marcher un maximum sans raquettes.
Vestige d'un temps révolu
Première neige à 1100 mètres
Nous en trouverons rapidement en abondance
Le chemin est propre et semble être fréquenté régulièrement. Le dénivelé se prend doucement. Nous finissons par rencontrer la neige fraiche, mais nous allons marcher un maximum sans raquettes. Plus il y a de neige, et moins on distingue le sentier. De plus, le balisage est très léger, c’est-à-dire une balise tous les 200 à 300 mètres. Ça complique nettement notre progression, le GPS est bien utile. Notre progression est lente, si bien qu’à 13h09 nous devons faire une halte pour manger. Nous sommes seulement à 1445 mètres et à peine 2h52 de marche. Nous trouvons une place assise proche d’une bâtisse en ruine, comme on en rencontre souvent dans les montagnes du département.
Etonnant paysage hivernal
Nous reprenons notre ascension à 13h59. Le sentier est plus évident mais la neige et de plus en plus abondante, plus glissante. Nous sortons du bois à 14h42, après 3h35 de bonne marche ; cela coïncide avec un court passage sur une arête facile qui surplombe Los Masos de Valmanya et les fameux bois de Patriques. Il est temps pour nous de chausser les raquettes.
Arrivée sur une crête qui domine Los Masos de Valmanya
Paysage typique après une chute de neige d'hiver
Nous sommes les premiers à passer ici depuis la dernière chute de neige, et la couche de poudreuse est profonde. On s’enfonce pratiquement jusqu’aux genoux. Comme le fait remarquer judicieusement Yannick : « on va y laisser la santé là-dedans !». Les relais pour unir nos forces vont s’enchainer jusqu’à rattraper la piste forestière du Llech.
Versant Ouest du Pic de l'Estelle et Pic Saint Pierre
Dans le lointain le Pic Neoulòs est aussi enneigé
Ici on s'enfoncera profondément
Cela coïncide également avec le même itinéraire que nos camarades qui sont passés par les Bois de Patriques et qui nous devancent. Ils viennent de faire une trace qui sera bien utile. Malgré cette trace, nous nous enfonçons. Cette piste forestière, je la connais, je la pratique depuis l’âge de 10 ans. C’est 5 km interminables. En été, en marchant vite, le tarif est d’une heure. Avec de telles conditions d’enneigement, le tarif double. Nous passons au ras de Prat Cabrera à 16h08 [4h45]. En avant pour une marche monotone, interminablement longue.
Sur la piste du Llech, par endroit plus de 60 centimètres de neige
La fatigue se fait sentir. Malgré cela, nous apprécions ce paysage blanc, silencieux, paisible. Mais ce blanc froid est sournois, comme un linceul, il pourrait nous envelopper éternellement. Il est indispensable de marcher sans relâche, d’autant qu’il neige légèrement. Que c’est long, mais que c’est long ! Et pourtant nous ne faisons aucune halte. La volonté est mise à l’épreuve, mais elle nous porte littéralement. Enfin le ras dels Cortalets et la partie terminale. Nous atteignons le refuge à 18h22 après 6h52 de montée continue. Nous aurons mis 2h14 pour parcourir cette piste si longue ; une éternité pour nous. Je n’étais jamais parti d’aussi bas pour une approche ; avec autant de neige c’est une folie à ne pas rééditer, mais heureux d’avoir encore la condition physique pour l’avoir réalisé. Plus de 1600 mètres de dénivelé dans la neige, c’est beaucoup trop.
Nicolas et Pierrick sont arrivés depuis seulement 10 minutes et dans un état de fatigue semblable au notre, avec pourtant 500 mètres de dénivelé en moins. Les conditions d’enneigement ne sont donc pas à prendre à la légère. Nous ne serons pas les seuls au refuge, mais il y a de la place pour tout le monde. Cela fait de la main d’œuvre pour scier du bois pour le poêle. La pression touristique autour du refuge se fait sentir car on ne trouve plus de bois mort, et les branches des pins à crochets sont coupées à hauteur d’homme. A cette vitesse, le bois manquera dans la prochaine décennie. La soirée passera agréablement, bien aidée en cela par une bouteille de muscat dont Nico a le secret, et la douce chaleur du feu de bois. A l’heure où nous nous couchons, nous sommes encore confiants sur la possibilité de gravir le sommet le lendemain.
Les chiffres de la journée :
Temps de marche total 6h52 pour 15 km à 2,2 km/h
Dénivelé positif total : 1674m - Dénivelé négatif total : 140m
Point culminant : 2150m
28/01/2018 – Jour 2 : refuge des Cortalets - cirque de la brèche - refuge des Cortalets - Ras de Prat Cabrera - GR36 - Baillestavy
Le vent a soufflé toute la nuit. Effrayant, terrorisant, glaçant ! Un de ces vents qui vous fait dire : « mais qu’est-ce que je fais ici ! » 6 heures, je me lève, je suis bien le seul. Le vent n’est toujours pas retombé, sortir du refuge serait une erreur. Pas de sommet aujourd’hui. Alors, retour dans les plumes chaudes du couchage. 8 heures tout le bâtiment se réveille, le vent a cessé son vacarme. Ce matin changement radical de couleur céleste : enfin une tempête de ciel bleu. Enfin nous allons profiter de la beauté exceptionnelle du site.
La face Est du Canigou prend les premiers rayons du jour
Vue depuis la fenêtre du refuge
Plus rien ne presse à présent, nous allons faire une promenade pour le plaisir. Nous partons en direction du cirque de la brèche à 9h45 ; Nicolas en ski file devant, nous suivons en raquettes loin derrière. Malgré l’absence de trace, la neige froide porte plutôt bien. Le reste en images.
Aux alentours du refuge des Cortalets
L'Estagnol dans sa version hivernale
L'Estagnol dans notre dos
Imposante face Est
Le cirque de la brèche
De retour vers les Cortalets
10h45, après 200 mètres de dénivelé, au niveau des derniers arbres, demi-tour. Il est plaisant de faire de grandes enjambées dans cette neige ouatée. Le retour au refuge s’effectue en moins de 30 minutes, et encore en flânant. Juste le temps de refaire nos sacs, et à 11h45 nous prenons la direction de la civilisation sous un ciel toujours aussi pur. Dans ce sens, la piste forestière paraitra nettement moins longue, mais nous mettrons quand même 1h12 pour arriver à l’entrée des bois de Patriques, carrefour de nos itinéraires respectifs. C’est ici que nous prendrons le repas.
La plaine vue depuis le ras de Prat Cabrera
Le cirque de la Lentilla avec le Puig Sec au centre
La fonte sur les branches a déjà commencé
13h45, les deux groupes se reforment pour partir dans des directions différentes. A bientôt les gars ! Quand à Yannick et moi, nous n’avons plus qu’à suivre nos traces laissées la veille. Seulement la neige fond vite sur les branches, et nous serons plus mouillés par ce goutte à goutte incessant, qu’on ne le fut avec les flocons du samedi. Refaire le chemin à l’envers nous a permis de trouver le passage qui nous avait fait perdre du temps, et l’on peut constater que la carte IGN n’est pas à jour. Il faut suivre le balisage, qui contourne le mas Cal Reì. Nous terminons cette journée à 16h12, après 3h26 de descente depuis le refuge. Même en raquettes, la descente fut rapide. Réaliser l’ascension du Canigou en plein cœur de l’hiver relève de l’exceptionnel, nous patienterons donc quelques mois avant d’y retourner.
Un grand merci à Yannick pour la qualité de ses photos, qui sont toutes de lui. Quand on n'a pas de tête, il faut toujours un reporter avec soi. Merci frangin !
Tracé du jour sur carte IGN
Les chiffres de la journée :
Temps de marche total 4h51 pour 15 km à 3,1 km/h
Dénivelé positif total : 251m – Dénivelé négatif total : 1794m
Point culminant : 2350m
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