Rando dans les Pyrénées en toute simplicité

Rando dans les Pyrénées en toute simplicité

Etape 4 : Refuge des Oulettes de Gaube – Refuge Bayssellance

Mercredi 19 Juillet 2023

Etape 4 : Refuge des Oulettes de Gaube (2151m) – Hourquette d’Ossoue (2734m) – Glacier d’Ossoue – VIGNEMALE Pique Longue (3298m) – Col de Cerbillona – Pic de Cerbillona (3247m) – Col Lady Lister – Pic Central (3235m) – Refuge Bayssellance (2651m)

 

A 5 heures le réveil sonne la fin d’une nuit agitée par un bel orage et de violents coups de vent. La salle de réfectoire est occupée par des campeurs venus trouver un abri solide, face à la rage du vent. Nous sommes les premiers à quitter le refuge des Oulettes, mais l’une des gardiennes est déjà debout pour nous souhaiter une bonne ascension. Le ciel est gris et très bas, rien de bien réjouissant pour ce rendez-vous avec le Vignemale. Mise en action à 6h05. Nous suivons de bon matin le balisage du GR10. Pendant la montée vers la Hourquette d’Ossoue, les premières gouttes de la journée nous surprennent. Rien de bien inquiétant pour le moment, mais il ne faudrait pas que cela dure. Nous passons la Hourquette d’Ossoue à 7h40, un col qui culmine quand même à 2734 mètres, une altitude remarquable pour le GR10. Nous parvenons ensuite au refuge Bayssellance tout proche à 7h55, pour une mise en jambe de 1h50, et 580 mètres de dénivelé positif.

 

En direction de la Hourquette d'OssoueIMG_1491.jpg

 

Vue sur le massif depuis la Hourquette d'Ossoue

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Gros plan sur l'arête Petit Vignemale/Pique Longue
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Cap sur le refuge Bayssellance
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Comme nous devons passer la nuit dans ce refuge, nous demandons la permission de se délester de tous les effets inutiles qui ne serviront pas durant l’ascension de la Pique Longue. Pendant que nous nous allégeons, deux bonnes ondées viennent frapper le massif, et l’eau coule de toute part autour du refuge. Des groupes de randonneurs ont quitté le refuge pour le sommet, mais la pluie les a surpris. Nous avons la journée devant nous, allons, nous patientons que le ciel se purge et à la première éclaircie, nous tentons l’aventure. Passer si proche de cet emblématique sommet et ne pas le tenter serait une grande frustration. Nous partons enfin à 8h40 avec l’équipement de pluie sur nous, et l’essentiel de matériel technique dans le sac, pour évoluer sur le glacier. Le ciel est partiellement bleu, et comme le vent souffle avec rage, nous espérons qu’il finisse par nettoyer cette masse nuageuse encombrante.

 

Vue vers l'ouest depuis la Hourquette d'Ossoue

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Le sentier descend dans un premier temps jusqu’à ce que l’on quitte le GR10, pour suivre une courbe de niveau à 2520 mètres. C’est la direction du glacier, glacier qui est encore loin depuis qu’il perd de l’épaisseur année après année à grande vitesse. Nous croisons de petits groupes de marcheurs qui reviennent en arrière, refoulés par les assauts du vent, c’est déjà la fin de l’ascension pour eux. Ils nous parlent tous du vent inouï qui balaye le glacier et les projette au sol, des pierres qui volent, de la pluie violente. Cela ne nous décourage pas pour autant. Oh, pas que nous ayons la prétention d’être meilleurs qu’eux, mais nous voulons constater par nous mêmes, et nous comptons surtout sur une amélioration de la météo en adéquation avec les prévisions qui étaient initialement bonnes. Pour l’heure, l’essentiel de la pluie s’abat sur le cirque de Gavarnie dans notre dos. Dès la première présence de neige, nous chaussons les crampons, enfilons le casque, et engageons la montée en direction du glacier. Il eut été possible de contourner la neige sur les roches polies par le glacier, mais la marche sur neige dure est plus efficace.

 

Il faut aller chercher la neige

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Les prémices du glacier approchent
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La rampe est réellement inclinée
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Malgré le froid ressenti dû au vent, la température est positive et la glace fond de façon continue. La prise de dénivelé sur le long névé est rapide et nous arrivons bien vite sur le glacier à nu. Ce n’est plus que de la glace vive d’un bleu indescriptible. C’est à pleurer de voir ainsi disparaitre une telle masse de glace si ancienne. Nous imaginons que l’eau qui s’en échappe a peut-être plusieurs dizaines de siècles, voire plus. Pas la moindre crevasse menaçante comme on peut lire dans les récits anciens de Russell, juste de l’eau qui coule en surface d’un glacier moribond. Pendant que nous progressons sur le glacier, une nouvelle averse s’abat sur le massif, mais de très courte durée, et le vent a faibli, à tel point que rien pour l’heure ne peut entraver notre marche.

 

Il y a moins de 10 ans, ces roches polies étaient sous la glaceIMG_1502.JPG

 

Premiers pas sur le glacier d'Ossoue
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La fonte est déjà très avancée à 3000 mètres
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Le glacier recouvre une cuvette qui donne la fausse impression d’être totalement plat, mais il n’en est rien. Nous suivons des traces de pas dans la neige, ce qui conduit à la partie terminale de l’ascension. Là où finit la neige, commence la roche et pratiquement 100 mètres de verticale à gravir. Nous y parvenons à 11h11, après 4 heures d’approche. Nous laissons les crampons et le sac à dos qui ne nous servent plus à rien, et entamons l’ascension finale. J’avais toujours lu que ce final se résumait à une courte cheminée croulante, mais il n’en est rien. Avec le manque de neige et de glace, c’est un véritable mur minéral qui protège la cime, avec des pierres instables, des dalles lisses, et des fissures dans tous les sens. Quelques cairns indiquent plus ou moins bien les meilleurs passages, mais il est préférable de se fier à son sens de l’itinéraire, en prenant le temps de bien lire le terrain. Nous passerons un peu trop sur la gauche de la face, ce qui imposera de revenir légèrement sur le fil de l’arête pour sortir sur la cime. Il est 11h44, c’est fait, me voilà sur le toit des Pyrénées Françaises à 3298 mètres, après 4h22.

 

Au loin les grottes Russell

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Pique Longue versant sud
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Vue vers le Montferrat
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Cheminement complexe dans la partie terminale
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La cime est tout en haut
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Sommet 3298 mètres
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Vue vers l'estIMG_1516.JPG

 

Le vent souffle finalement bien peu en comparaison de ce à quoi nous avons fait face quelques heures plus tôt. Nous pouvons admirer à loisir les 1000 mètres de vide qui nous séparent du refuge des Oulettes en versant nord, où nous venons de passer la nuit. Tout est grandiose ici, démesuré. Les Hautes-Pyrénées ne sont pas seulement hautes par l’altitude, elles sont avant tout impressionnantes par les abîmes, par la violence du travail de la glace sur la roche à façonner des verticales, des parois et des arêtes remarquables, à polir la roche jusqu’à la réduire à l’état de sable. Notre obstination à avancer a été récompensée de la plus belle des manières, par un panorama ouvert sur 360 degrés. Nous ne pouvons pas être plus haut à l’Ouest de la chaine. Seul le Monte Perdido plus à l’Est nous domine d’une cinquantaine de mètres. Un espagnol solitaire ne tarde pas à nous rejoindre, et nous lui laissons le sommet, alors qu’une cordée de 10 personnes approche également de la cime.

 

Vue vers l'ouest
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Gros plan sur les Infiernos, Grande Fache et Balaitous
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Au premier plan Pic du Clot de la Hount

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Vallée et refuge de Gaube
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Vue en direction du refuge Bayssellance
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Gros plan sur le Pic d'Ardiden

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Vue sur la brèche de Gaube dans le trou et le cirque de Gavarnie dans le lointain
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Nous repartons après avoir passé un certain temps que je n’ai pas mesuré. Cette fois nous redescendons en passant par la bien nommée « Grotte Paradis », la plus haute que le comte Russell avait faite percer. Le retour aux sacs à dos s’est plutôt bien déroulé, car nous étions les seuls sur la face, donc aucun risque de chute de pierres sur nos têtes. Nous chaussons à nouveau les crampons, et prenons la direction d’une nouvelle cime, celle du Cerbillona. Il s’agit de marcher à nouveau sur le glacier, passer sous les trois « Grottes Russell », déchausser à nouveau les crampons et monter au col de Cerbillona. Ce court couloir fait de terre est un calvaire, car le terrain ne porte pas ; tout croule, roule, s’écroule. Et pour compliquer l’exercice, le vent a repris sa folie délirante. L’effort est grand pour parvenir au col, aussi épuisant qu’un sprint en fractionné, si bien que nous faisons d’une traite la marche en faux plat menant au second sommet du jour. Nous voilà au pic de Cerbillona, Il est 13h10, et nous aurons mis 5h03 en tout. Le vent est d’une brutalité telle qu’il faut vite quitter la cime pour prendre le repas à l’abri tout relatif d’une dalle.

 

Grotte Paradis

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Regard sur le glacier et le pic Central

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Les 3 grottes Russell sous le Pic du Clot de la Hount
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Rampe finale depuis le col de CerbillonaIMG_1542.JPG

 

Pique Longue vue depuis le sommet du Cerbillona
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Le glacier d'Ossoue vue dans son intégralité
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En roches claires la vallée de los ibones de Batanes, et l'ibón bajo et alto de Batanes sur le chemin du col de Letrero
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Pique Longue, en bleu l'itinéraire que nous avons suivi à la montée plus à déconseiller, en rouge celui de la descente plus "officiel"
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Vue vers le sud sur la vallée du río Ara
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Pour profiter encore un peu de notre présence sur ces hauteurs, à 14h15, nous avançons sur la crête frontière pour se rendre sur une nouvelle cime. Il s’agit du Pic Central. La crête s’abaisse légèrement au niveau du col Lady Lister, puis reprend de la hauteur pour parvenir à Pic Central. Pas de difficulté majeure autre que le vent qui ne faiblit pas. Nous enchainons encore un peu plus loin sur cette crête en direction du Montferrat, mais le vent est trop déstabilisant pour avancer en sécurité sur des parties étroites. A la première occasion, nous quittons alors la crête pour aller chercher au plus court la neige, puis le glacier. Usage des crampons à nouveau obligatoire.

 

Crête menant au Pic Central

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Montferrat et feu glacier de Labaza
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Par delà le Grand Pic de Tapou le cirque de Gavarnie
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Pic de Cerbillona, col de Cerbillona, Pic du Clot de la Hount, Pique Longue
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Grottes Russell en jaune, Grotte Paradis en rouge
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Sur la crête entre le Pic Central dos à Yannick et le Montferrat

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Sur la crête vers le Montferrat

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La perte de dénivelé en crampons sur la neige est efficace et nous retrouvons vite le glacier. Ce dernier a considérablement changé en quelques heures ; c’est une rivière qui coule à la surface. Les quantités d’eau que libère la glace est considérable. En aval, ce sont de véritables cascades qui jaillissent par de puissants jets. En définitive, le glacier fond jour et nuit, il ne survivra pas à la prochaine décennie. Nous quittons le glacier à 15h51 [6h22]. Il fait très chaud. Ici nous sommes à l’abri du vent.

 

Pointe Chausenque et Petit Vignemale

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La fonte a fortement accéléré
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Dernière langue de neige
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L'eau jaillit à gros flôts
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Nous regagnons le sentier, puis le GR10, pour une courte remontée au refuge de Baysselance. Fin de cette journée épique à 16h30, pour un total de 6h55. Ici pas de douche, toilette très succincte. Un peu de repos à la terrasse pour un bain de soleil, et des échanges chaleureux avec des randonneurs rencontrés la veille au refuge des Oulettes. Après la bière locale pour fêter cette réussite, nous passons à table à 19 heures. Le refuge est complet, autant de français que d’espagnols, d’où un vacarme assourdissant pendant le repas. Heureusement, le calme à l’heure du coucher est respecté et nous fermons les paupières à 21h30. Demain sera déjà la fin de ce périple, que j’avais imaginé et planifié depuis plusieurs mois. Comme le dit le proverbe espagnol : « En una hora se come el pan de la boda ».

 

Barrage d'Ossoue

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Dernier regard vers le Montferrat
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Face ouest du Pic de Labas
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Cirque de Gavarnie
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Trace du jour :

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Les chiffres de la journée :

Temps de marche total 6h55 pour 13,5 km à 1,9 km/h

Dénivelé positif total : 1577 m – Dénivelé négatif total : 1081 m

Altitude maxi : 3298 m - Altitude mini : 2151 m

 

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04/08/2023
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