Cambre d’Ase par le couloir du Caro-Line D inf
13/04/2014 : station d’Eyne – pied du cirque – couloir du Caro-Line - sommet du Cambre d’Ase – grande cheminée – station d’Eyne
Après une bonne nuit passée au bord de l’église de Planès, nous quittons en voiture ce paisible village, pour nous rendre à la station de ski d’Eyne. A notre arrivée, de nombreux groupes partent déjà en direction du Cambre. Cela va nous mettre la pression, afin de les rattraper pour être les premiers dans le couloir. Nous quittons donc le parking à 7h42. La station de ski a déjà terminé la saison, et les pistes fermées au public manquent déjà cruellement de neige. C’est donc, les raquettes accrochées sur le dos, que nous allons marcher.
Dans notre dos, la face Sud du Carlit domine la Cerdagne
Nous avons eu un bon regel nocturne, ce qui a bien transformé la neige en un tapis bien dur. Nous passons, la première bute, et sans faiblir nous avons rattrapé tous les marcheurs au niveau du plat du Cambre. On questionne un peu sur les directions qu’ils vont prendre, et il semble que nous soyons les seuls à convoiter le couloir du Caro-line : c’est le couloir à gauche de la Grande Cheminée. C’est une bonne chose, car moins il y a de monde dans un couloir, et moins il y a de risques d’accident par chutes de pierres ou de glace.
Première vue sur ce qui nous attend
Nous remontons la dernière piste de ski, et nous nous élevons dans la forêt. A l’approche du plancher du cirque, la neige porte parfois moins, et l’on s’enfonce par endroits profondément. C’est ce qui va m’arriver quand ma jambe droite disparaît totalement sous cette neige glacée. Je suis pris jusqu’à la taille. C’est assez drôle de me voir ainsi coupé en deux, et l’on rigole de bon cœur puisqu’il n’y a rien de grave. Or, au moment d’extraire ma jambe droite de ce glaçon, cela devient moins drôle. En effet, la neige froide a comblé le trou et la jambe est totalement bloquée. Je vais me bagarrer un moment, laissant beaucoup de force, pour récupérer ma jambe et me remettre sur pied. Nico a pris de l’avance, et j’arrive au pied du cône de déjection, complètement vidé de force. Il faut dire que nous n’avons mis que 1h20 pour arriver là. Il est 9h04.
Nous effectuons donc une pause salutaire pour reprendre des forces. Nous laissons sur place ce qui ne servira pas : raquettes et bâtons. Il ne fait pas froid et pour une fois, le chaussage des crampons n’est pas une lutte contre les onglets aux doigts.
Le couloir en ligne de mire, légèrement à gauche
15 min d’arrêt et à 9h19, on engage la remontée du cône sur de la neige bêton. Chacun monte à son rythme, mais nous restons assez proche. Sur cette neige aussi dure, la prise de dénivelé est rapide et sans perte d’énergie inutile. Dans sa première partie, le couloir a un aspect débonnaire à la façon du Vermicelle.
Pourtant, il cache dans la partie supérieure des ressauts rocheux et même en glace, ce qui va nous donner du fil à retordre.
Premier ressaut en approche
Voilà à quoi cela ressemble
Au premier ressaut, il y a des plaquettes sur la gauche de la paroi, pour effectuer un relai. Nico s’engage le premier dans le passage avec de la glace fine. Pas facile de protéger ensuite le reste de la longueur, il faut rester vigilant à chaque pas. A mon tour ensuite, je vais découvrir ce que c’est qu’un vrai couloir en mixte, avec un véritable engagement. Le cœur bat plus vite à chaque fois que j’ancre les piolets ; les crampons crissent sur la roche et ça passe. L’arrivée au relai est un soulagement.
Voilà à quoi cela ressemble une fois passé
Les manipulations de cordes se passent parfaitement bien, et Nicolas repart sans attendre dans le second ressaut. On contourne par la droite un petit éperon, puis on tombe nez à nez sur la difficulté suivante. Là encore, pas simple pour protéger. Nicolas va devoir pitonner pour établir le second relai. En attendant, immobile, le froid se fait sentir et il me tarde de me lancer dans cette seconde difficulté. Au « relai prêt » de Nico, je récupère le matériel et je m’engage. La difficulté est identique à la précédente, c’est à dire roche et glace fine.
Une fois le ressaut franchi le relai est atteint sans difficulté une fois encore. La dernière longueur nous conduit, à la sortie, sur une grande pente de neige. Pourtant nous ne sommes pas en haut du cirque, mais seulement sur une sorte de balcon.
Face à nous, la Grande Cheminée
Pour rejoindre la dernière pente de neige, on a le choix entre enjamber une immense corniche, où la contourner par le haut. C’est ce choix, plus raisonnable, que fait Nicolas.
Le passage délicat se trouve derrière
De là où je me trouve, je ne vois pas la véritable difficulté. Derrière une brèche se cache un passage rocheux, sur une vire, qui est très impressionnant de prime abord. J’attends un long moment que Nicolas efface cette difficulté, mais cette fois je suis au soleil, c’est bien plus agréable. A mon tour de partir, je récupère la sangle qui faisait un becquet, et je pars vers ce passage inconnu. Une fois le nez dedans, c’est réellement impressionnant car le passage est étroit, mais Nico l’a bien protégé par 3 points en pitons.
C’est le passage le plus aérien de la voie, mais pas le plus engagé finalement.
Le temps de retrouver Nico, et c’est moi qui pars devant en corde tendue, pour franchir la dernière pente bien relevée.
A 12h05, nous sommes au sommet ou presque, à 10 mètres à peine. Cela nous aura pris 4h03 pour avoir le droit de contempler la vallée de Planés par le haut, ainsi que la face Ouest du Malaza et ses nombreux couloirs.
Le Nou Founts au centre et la Tour d’Eyne à droite
Nous rangeons corde, dégaines et pitons, et longeons le haut du cirque sur un terrain plus sec que neigeux. Le soleil est déjà chaud et la neige se ramolli à vive allure. Pas de temps à perdre, il faut redescendre avant que ce ne soit de la soupe.
Sommet du Cambre d’Ase
La sortie du couloir, vue depuis la Grande Cheminée
On descend la Grande Cheminée sur de la neige encore bien dure et à 13h, on s’installe sur le toit d’un orri pour prendre le repas au soleil. Nous retrouvons les membres du groupe du matin, qui s’est divisé, pour aller « visiter » d’autres couloirs moins techniques. Le Cambre d’Ase est un rare sommet qui offre autant de choix dans un même lieu ; c’est l’idéal pour de l’initiation jusqu’au plus engagé. Nous faisons une bonne halte de 55min et à 13h55, nous partons, raquettes aux pieds, en direction de la station.
Le retour est une pure formalité, si bien qu’à 14h50 nous avons retrouvé notre point de départ, le tout en 5h34.
Encore un nouveau couloir que je découvre cet hiver dans ce cirque glacière. Certainement le plus difficile de tous ceux qui m’ont été donné de gravir, mais aussi le plus beau, le plus varié dans les difficultés, sans pour autant être extrême. A refaire un prochain hiver, avec un premier de cordée sûr de son expérience, et sa technique. Merci Nico pour ce beau week-end.
Les chiffres de la journée:
Temps de marche total 5h34 pour 12,2 Km à 3,5km/h
Temps pour faire le couloir : 2h45
Dénivelé positif total : 932 m – Autant en négatif
Point culminant : 2750m
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