Pic de Thoumasset par la cabane de la Sabine
15/08/2018 : départ au-dessus du barrage de Riéte – chemin à Jojo – cabane de Quioulès – cabane de la Sabine – Pic de Thoumasset (2741m) – étang de Soulanet – vallon du Soulanet – cabane de Quioulès – départ
Si loin au fin fond de l’Aston Ariègeois, le pic de Thoumasset n’est pourtant pas le plus haut dans les environs. Il côtoie des « 2900 » sur la frontière franco-andorrane, mais lui est totalement Français. Pourtant il m’a toujours attiré, par son nom peut-être, par son éloignement sans doute. Malgré un départ à 1600 mètres d’altitude, son accès par le Nord s’apparente à un périple. C’est d’ailleurs la signature de toutes les randonnées dans l’Aston. Et ici, plus qu’ailleurs en Ariège, la solitude est la seule compagne du marcheur. Départ à 7h10 depuis le parking du terminus d’une piste à l’aplomb du barrage de la Riète. Il faut s’engager sur le chemin à Jojo, un sentier judicieusement tracé et bien entretenu, qui domine le torrent du Quioulès. Il prend vite du dénivelé puis redescend au niveau du captage d’eau pour le barrage.
Première vue de la vallée depuis un belvédère
Au niveau de la conduite forcée, il me prend une idée surprenante, aller récupérer le sentier qui monte depuis le barrage, sur l’autre rive. Je franchis le torrent d’un bon, voilà une heure que je marche [8h10]. Quelle erreur ! C’est un sentier discontinu, dans une végétation dense, parsemée de tourbières bien humides. Je n’avance pas, pire, je m’enlise. Le regard scanne le sol pour chercher le moindre indice de sente, de cairn, de balise. Rien ! Mais cette attention exacerbée va m’offrir un cèpe et une bonne poêlée de lactaires. C’est déjà ça.
Digitale pourpre, si belle, si mortelle
La vallée se divise une première fois en en deux mais il faut laisser sur la gauche ce nouveau vallon, pour garder le cap S/SO jusqu’à la cabane de Quioulès. Je laisse sur la gauche la cabane de Quioulès, occupé par 8 magnifiques mérens. Après la cabane, la vallée principale se divise en une patte d’oie à trois branches. Il s’agit de rester sur la partie la plus à droite en remontant le torrent de la Sabine ; ça c’est la théorie avec la carte, la réalité du terrain est moins évidente. Je m’engage trop rapidement dans la vallée de la Sabine. Là encore, je ne vois pas le sentier, tout comme deux marcheurs devant moi [9h10]. C’est en mode sanglier que l’on évolue dans un sous-bois de résineux. Parfois un cairn, puis plus rien ; un bout de 30 mètres de sentier puis rien à nouveau. C’est usant. Je parviens à la cabane de la Sabine à 10h05, après 2h50. On doit pouvoir faire bien mieux avec un vrai sentier. Pause obligatoire avant d’affronter la suite.
Pic de Thoumasset le plus à droite, mais je ne le sais pas encore
Cabane de la Sabine
Intérieur douillet
Pic de la Sabine et le couloir Sud
Je laisse les deux autres randonneurs, et je remonte un premier verrou en direction des étangs de la Sabine. On peut éviter de passer par l’étang de la Sabine d’en bas en tirant directement vers l‘Ouest jusqu’à l’étang de la Sabine d’en haut.
Etang de la Sabine d’en bas
Là encore, je vais manquer d’inspiration car j’ai fait une erreur de sommet. Le sommet que je crois être le pic de Thoumasset se révèlera être le pic de l’Etang Blaou. Je suis en train de filer droit vers la crête déchiquetée de la Soulane. Il faut corriger immédiatement cette erreur. Je me suis éreinté à monter des verrous dans des amas de blocs, je n’ai pas la volonté de faire demi tour. Je dois dire que les étangs de la Sabine d’en haut ne sont que des mares asséchées ou en cours de comblement. Je ne m’attendais pas à trouver cela.
Pic de Thoumasset à gauche, pic de l'Etang Blaou au centre
Sur ma gauche l'imposant versant Nord du pic de Serrère
Je décide alors d’effectuer une traversée en direction du Sud/Ouest, vers la base du Thoumasset. J’essaie de rester au mieux en courbe de niveau, mais le terrain va dicter sa loi, implacable. C’est une succession de dalles sur des pentes d’herbe extrêmements inclinées, entrecoupées de cheminées pour passer d’un étage à l’autre. C’est épuisant. Je vois plus bas que les deux randonneurs ont fait demi-tour, ils ont renoncé. Je suis seul dans mon piège, car il est à présent impossible de redescendre. Il faut coute que coute trouver les bons passages. Je n’avance pas, pire, je perds l’espoir de gravir le moindre sommet. Le Thoumasset me toise, veut il me mettre à genoux ? Il est 12h05, j’ai simplement besoin de manger. Cela fait 4h33 que je marche, et seulement 1050 mètres de dénivelé épuisants ; j’ai l’impression d’en avoir gravi le double. Tous mes repères habituels sont faussés. Je ne suis qu’à 2200 mètres, mais je me trouve exactement au milieu de nulle part. Perché sur mon éperon rocheux, j’observe cette nature sauvage, mais si simple dans ses choix : mange ou soit mangé, marche ou crève. C’est binaire, c’est facile, c’est limpide. Le temps est radieux, rien ne peut donc s’opposer à ce que je gravisse un sommet. 12h35 je remets ça, plus décidé que jamais.
Le Thoumasset
La traversée plus ou moins
Les étangs de la Sabine
Face Nord du pic de Thoumasset à l'heure du repas
Un aigle botté pris au zoom ; impossible de l'immortaliser en vol
Il faut traverser un nouvel éboulis grossier et s’engager dans un couloir d’herbe. Je me trouve ici sous la face Nord du Pic de Thoumasset. 500 mètres de dénivelé positif me séparent de la cime. Il faudrait compter une bonne heure s’il y avait un sentier, pour se rendre au sommet. Qu’en sera-t-il sur ce terrain hostile ? L’amas rocheux est vite franchi, le couloir d’herbe se redresse mais se grimpe aisément. Un isard m’observe d’un peu plus haut, mais s’enfuit bien vite. Il n’y a ni randonneur, ni troupeau, mais il y a de l’eau et de l’herbe verte, pourtant aucune harde d’isard. L’Ariège me surprendra toujours dans sa gestion de la faune sauvage !
Le couloir sort sur un col, le pas de la Soulane, la cime est alors sur ma droite. Là, comme par miracle, un sentier et de nombreux cairns alors qu’il n’y a pas l’ombre d’un doute sur l’itinéraire. Je vais de surprise en étonnement ! Le point sommital est atteint à 13h33 après 5h31 de réels efforts ; contrat rempli après avoir effacé le dénivelé en moins d’une heure. Je viens de mettre le sommet du Thoumasset sous mes pieds, et m’offrir un panorama exceptionnel. L’adjectif n’est pas assez fort. La vue sur 360 degrés est prodigieuse ; le regard se noie à l’ouest dans le bleu profond du bien nommé étang Blaou que l’on découvre au dernier moment. L’original étang de Soulanet au nord ne manque pas de charme également. Il y a même un étang sans nom qui se devine dans la cuvette Est du sommet. C’est une grande récompense, le reste en images.
L'étang Blaou
Plein centre le pic de Font Blanca ou pic du Port
Etang de Soulanet
Gros plan vers le Sud
Par delà le massif de Bassies apparait le Mont Valier
Gros plan sur le Mont Valier
Vu vers le Nord sur le pic de la Sabine et au loin le massif de Tabe, en rouge mon itinéraire
Gros plan sur le pic de la Sabine
Loin vers l'Est
Le choix du retour est aigu à présent, car je suis au point le plus éloigné de ce périple, et il est déjà « tard ». Revenir par le même itinéraire, hors de question. La crête des Bagnels ne me parait pas assez simple pour avancer vite. Le vallon de Seignac me plairait bien mais cela impose de passer un col à 2482 mètres après l’étang de Soulanet, et je n’en ai plus l’énergie. Le plus simple reste alors le vallon du Soulanet. A 14 heures mon choix est fait, je plonge dans la face Sud du Thoumasset. Des cairns matérialisent pour un temps le meilleur passage parmi une succession de couloirs herbeux. Il y a des sources de toute part, idéal pour refaire le plein en eau potable. Au niveau de l’étang de Soulanet on rattrape une sente de vaches qui conduit rapidement à une grande prairie où se trouve d’ailleurs un troupeau de gasconnes.
En descendant vers l'étang
Telle une vigie, le Thoumasset domine les prairies de Soulanet
Au fond la forme massive du pic du Sal
Pâturage avec le pic de Sal au fond
A partir de ce surprenant plateau, le ruisseau a formé une gorge, impossible à suivre donc. Quelques cairns matérialisent un sentier qui s’écarte du torrent puis plus rien. Je perds toute trace. Comment est-ce possible ? Des fougères, des rhododendrons, des pins, des genévriers, des rochers recouverts de mousse, mais pas de sentier. C’est l’enfer vert ! Et la pente plonge brutalement. Grand moment de solitude pour perdre 70 mètres de dénivelé dans cet environ à ne conseiller à personne. Il doit bien y avoir un meilleur accès car les vaches ne sont quand même pas héliportées, mais je n’ai pas trouvé. Puis il suffit de rattraper le sentier matinal, sous la cabane de la Sabine. En étant attentif, je vais arriver à suivre intégralement ce sentier jusqu’au pont qui enjambe le Quioulès. Il est 16h45 [8h10] quand je traverse le pont.
Cabane de Quioulès
Dans ce sens tout devient évident, un bon sentier traverse les prairies et non des tourbières, sur la rive droite du Quioulès. Je retrouve le chemin de Jojo qui me ramène à mon point de départ à 17h59, après un périple de 9h21. Le sens de l’itinéraire a été mis à l’épreuve. L’Aston c’est long, je confirme, c’est très long, c’est trop long. La récompense est au bout de l’effort, mais la raison voudrait que l’on passe une nuit en cabane pour gagner ce sommet. J’ai bénéficié d’une journée parfaite d’un point de vue météo, mais qu’en serait-il par temps brumeux ou orageux ? Anticyclone indispensable quand on se lance dans ce secteur.
Tracé du jour sur carte IGN 1/25000
Les chiffres de la journée :
Temps de marche total 9h21 pour 24,3 km à 2,6 km/h
Dénivelé positif total : 1630m – Autant en négatif
Point culminant : 2741m
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