Pic Rodó par le couloir N/W, retour par la crête de l’Anyella (PD sup)
28/06/2025 : Prats-Balaguer – bassin d’Aumet – GR10 – refuge de l’Orri – Pic Rodó (2645m) – Crête de l’Anyella (PD sup) – L’Estanyol – refuge de l’Orri – Prats-Balaguer
J’avais eu la chance de gravir le pic Rodó deux fois par une voie alpine rocheuse, superbe, esthétique à souhait comme l’est ce sommet, mais je doutais d’un accès pour randonneurs, tant cette cime semble être un château médiéval imprenable. Mon amie Amédine avait résolu cette énigme par un couloir en versant S/E, dont voici le beau récit : http://balades-lison.blogspot.com/2020/08/le-pic-rodo-en-mode-rando.html. La randonnée du jour propose une ascension par le couloir N/W. Si le pic Rodó n’est pas le plus haut sommet de la vallée de la Riberola, il est incontestablement le plus spectaculaire de tous. Avec ma Corinne, nous allons partir pour une ascension inédite pour l’un comme pour l’autre, avec l’intention d’en découvrir un peu plus sur un sommet qui nous intrigue. C’est à 8h35 que nous quittons la ruine du château de Prats-Balaguer. Nous avons estimé que la piste qui conduit au bassin d’Aumet était en trop mauvais état pour aller au-delà de l’antique bâtisse en ruine. La météo est idéale, ciel limpide et pas un souffle d’air. Nous suivons le sentier balisé de jaune, qui va quitter rapidement la piste pour s’élever parallèle à celle-ci et parvenir rapidement au bassin d’Aumet où l’objectif du jour apparait fièrement, presque inaccessible.
Gros plan sur le pic de Monellet vu depuis le départ
Crête allant du Puig Rodon au Pic de Monellet
En chemin Pic de Monellet à G et Pic Rodó à D
Bassin d'Aumet
Nous emboitons le pas du GR10 jusqu’à enjamber le ruisseau de la Riberola que nous allons remonter. Le sentier est agréable, richement fleuri, et tout incite à flâner au bord de l’eau. Cette vallée est incontestablement l’une des 3 plus belles du département des Pyrénées-Orientales. Pas de question à se poser si ce n’est d’observer attentivement la face nord du Rodó afin d’imaginer un passage. Ce versant devient de plus en plus impressionnant plus les détails apparaissent clairement. Après un grand pin mort caractéristique et un pin aux trois troncs, il faut traverser une nouvelle fois le torrent pour quitter le sentier.
(photo Corinne)
Source de la Dinada
(photo Corinne)
Le pin au trois troncs (photo Corinne)
Panorama sur le pin au trois troncs (photo Corinne)
Nous nous trouvons à cet instant en face du couloir N/W. Il faut traverser un champ compact de rhododendrons où j’apprécie d’avoir de longues jambes ; Corinne est noyée dans la végétation jusqu’à la taille. Puis un beau pierrier nous sépare encore du pied du couloir. Chacun choisira au mieux son itinéraire en louvoyant dans ce champ de blocs et nous parvenons au pied du couloir à 11h10, pour 2h35 d’approche. Nous nous élevons jusqu’à trouver un peu d’ombre et effectuons une courte pause.
Couloir N/W du Pic Rodó
Le pierrier que nous venons de traverser
Il y a parfois un sentier mal dessiné
Une courte pause (photo Corinne)
Le couloir semble être fréquenté puisqu’un semblant de sente apparait parfois là où le sol est meuble. Ce couloir se monte aussi bien en rive gauche qu’en rive droite et le terrain n’est pas trop croulant, toutes proportions gardées pour ce type de terrain singulier. S’élever ici est avant tout plus physique que technique. Nous sortons enfin à 12h10 pour 3h15 d’efforts. La partie technique va pouvoir commencer.
Fin après un accident fâcheux
(photo Corinne)
Vue vers l'ouest le Roc del Boc vu depuis le haut du couloir
Vue vers l'est le Pic de Racó Petit depuis le haut du couloir
A la sortie du couloir sur notre droite où il faut grimper
En avant pour presque 130 mètres de hors sentier vertical
Prendre immédiatement main droite pour s’élever dans la face nord. Il faut faire appel à sa lecture de terrain pour trouver les meilleurs passages. Il s’agit de s’élever S/E en prenant soin de ne pas trop s’écarter de ce cap Par un enchainement de fausses cheminées nous prenons de la hauteur. De nombreux éperons rocheux barrent la face, surtout ne pas chercher à les traverser. Il faudra bien observer le haut de la paroi pour identifier une faille coiffée du pin à sa droite ; c’est le passage clé. La face devient de plus en plus verticale jusqu’à buter contre le rempart terminal. Nous n’avons pas osé escalader la faille et avons opté pour une traversée latérale sur la gauche de la faille. Par de courtes vires étroites, nous franchirons ce mur final. Une bonne adhérence des chaussures est indispensable. Je suis admiratif devant le sang-froid dont fait preuve ma Corinne qui n’est pas coutumière de cet exercice. Je trouve bon de préciser que ce n’est pas de la simple randonnée, et que toute glissade serait fatale. Ce passage débouche sur la partie sommitale où il faut encore gravir 70 mètres de dénivelé avant de toucher le point culminant. Objectif atteint à 13 heures, le tout en 4 heures. Le plus spectaculaire depuis ce point est le partage des vallées de la Riberola et de la Bailette au nord, et l’imposant pic de Nou Fonts au sud qui semble nous écraser.
La vire que nous avons empruntée
Vue vers le nord avec le massif de Madres à l'horizon
Sous le mur terminal avant la vire
La partie hors entier depuis la sortie du couloir
Une fois la difficulté passée, un peu de randonnée
Il fait faim pour moi, mais Corinne souhaite avancer pour découvrir au plus vite l’arête qui nous attend, alors nous enchainerons sans plus attendre. Ce qui arrive immédiatement après le point culminant est un sentier, mais ne nous y trompons pas, une véritable arête rocheuse se dresse sur la route, c’est la crête de l’Anyella avec un vide abyssal de part et d’autre. Après une pointe coiffée d’un ostentatoire cairn, l’arête devient plus chaotique et technique. Nous éviterons au mieux les difficultés majeures en passant sous le fil de la crête, mais un pas sûr est toujours recherché. Une remontée sur une face sombre demande beaucoup de précaution, ce n’est clairement pas de la randonnée. La crête est esthétique, joueuse, mais demande une concentration constante. Corinne a fait preuve de beaucoup de maitrise et de confiance en ses capacités. Arrive une brèche où un rappel s’impose. Au moment d’effectuer le rappel, le chronomètre s’arrête mais l’heure tourne ; heureusement la météo est stable, aucun orage à l’horizon. Corinne efface le rappel sans coup férir, une première en terrain d’aventure, comme ce fut le cas pour moi 11 ans plus tôt au même endroit.
En avant vers la crête de l'Anyella
Tour d'Eyne et Estanyol vus depuis la crête
Corinne au rappel
Le même exercice vu d'en bas (photos Corinne)
Il faut ranger le paquet de vermicelles
L’arête ne s’arrête pas là pour autant, encore un dernier mur à franchir juste après le rappel, puis plus de difficulté jusqu’à trouver un couloir sur notre droite. Un sentier poursuit le cheminement jusqu’au coll d’en Bernat, mais nous n’irons pas aujourd’hui. C’est à cet instant que nous quittons l’arête, cap sur le haut de la vallée de la Riberola. La descente est vraiment rapide et dans une prairie à 2500 mètres, nous nous posons pour se restaurer. Il est déjà 15 heures, le tout en 5h05 effectives.
Un passage encore assez fin
Vue vers le S/E sur le Pic de de Racó Gros
Gros plan sur le Pic de l'Infern
Couloir échappatoire vu d'en haut
Couloir échappatoire vu d'en bas
Reprise de la marche à 16h10. Le retour s’effectuera par la classique descente de la vallée de la Riberola, aussi fleurie dans sa partie supérieure qu’inférieure. Cette vallée n’en finit pas de nous enchanter. Des isards broutent nonchalamment au bord de l’Estanyol. Des marmottes traversent les pelouses, la montagne vit et nous en sommes les chanceux témoins. Pas de difficulté mais beaucoup de marche. Nous ne croiserons personne durant ce retour. Les kilomètres se déroulent et l’horloge tourne. Il est 19h17 lorsque nous retrouverons le point de départ. Nous en terminons après 8h01 et le retour aura quand même demandé 3 heures. La distance totale n’est pas impressionnante, mais la fatigue globale est profonde. La marche en crête est vraiment exigeante et puise plus dans les réserves qu’une longue montée en sentier. Une immense admiration pour ma Corinne qui a passé toutes les difficultés avec calme, concentration, sans jamais céder à la panique malgré son appréhension du vide.
Isards mères et petits
D'où nous venons
La crête de l'Anyella que nous venons de parcourir
L'Estanyol sous le versant nord du Nou Fonts
C'est la pleine saison des rhododendrons fleuris
(photo Corinne)
Dernier regard sur le couloir matinal
Gros plan sur la partie technique
Les chiffres de la journée :
Temps de marche total 8h01 pour 18,8 km à 2,3 km/h
Dénivelé positif total : 1225 m – Autant en négatif
Point culminant : 2645m
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